De même que les modalités électorales sont à penser à l’aune de l’évolution de consommation, avec son lot de pulsions et d’émotionnel, « citoyenniser » les attitudes des consommateurs, est-ce une voie possible pour le marketing, qui s’inscrirait dans un nouveau « roman national » où les entreprises et les marques iraient de leur voix et leur voie. Avec face à eux des individus citoyens-consommateurs, pour l’ensemble en mal d’adhésion, de croyance et de confiance. Ce serait la mission des marques, leur « good willing », là où échouent les confrontations politicardes, décrédibilisées, et où prônent antagonismes, incompatibilités et rejet de l’autre.

Est-ce une façon de « faire commun » ou de s’engouffrer dans l’impasse des fausses promesses et d’un social washing ? Si ce n’est pas aux entreprises d’hériter de ce rôle, elles pourraient rassembler sous une bannière de sens, si ce n’est l’unanimité du moins des entités de groupe, comme réponse au chaos politico-social. Construire de nouveaux attachements, des liens de confiance et de croyance, n’est-ce pas le désir des marques chahutées par des consommateurs de plus en plus exigeants et éprouvés dans leur vie quotidienne ? Des exemples ne manquent pas à l’appel d’un mieux-vivre pour soi et ensemble, car adhérer à des valeurs de consensus qui transcendent son propre moi ne s’oppose pas au besoin d’une personnalisation d’une offre et à la reconnaissance de ses vrais besoins, comme réponse juste et singularisée.

En sous bassement de ces faces conjointes, différencier et faire commun, la visibilité des inégalités heurte le chaland et peut exacerber plus encore le repli et les revendications individuelles non satisfaites. Y remédier serait un antidote majeur, sachant tout le monde ne peut recevoir de réponses adéquates.

Sachant aussi que ces inégalités jouent la synergie entre l’offre et la demande.

Sans exhaustivité, celles de l’offre tournent autour de la non accessibilité pour tous du bon et du bien – pour soi, pour la planète – même si le savoir-consommer sait faire la part des choses. Le positionnement beauté/santé d’un yaourt de Danone à l’huile de bourrache n’a pas suffi à sauver le produit malgré la notoriété de la marque. Trop de segmentations mal digérées par des équipes en quête d’innovations mal conçues nuisent à la solidité d’une marque qui se veut « démocratique » au global… et risquent par un prix majoré sans bénéfice perceptible une perte de cohérence et de crédibilité !

Ce défaut de cohérence nuit à la justesse d’offres qui se veulent « plus good que good » en œuvrant pour le bien commun par des prophéties auto-réalisatrices, provoquant les dérives que l’on sait du « good-washing ». La palette de mea culpa de promesses mal tenues ne suffisent pas à alimenter un « commun » basé, entre autres, sur les racines profondes et identitaires des marques. L’exemple d’un président qui veut offrir une France transcendée par les JO, ne suffit pas à rassembler les laisser pour compte de ces résidents parisiens dans leurs difficile accès à leur domicile et leur travail. Et faire payer des services postaux à des seniors, en soi une diversification du groupe Le Poste, fait perdre la notion même de « contrat social », entre le public et la société civile en adoptant des transactions chères au privé.

Du côté de la demande, on peut évoquer entre autres les difficiles accès au tout digital pour des populations non aguerries, et évidemment les inégalités socio-économico-culturelles qui jouent sur les capacités d’arbitrage, entre pulsions et gestion positive des réels besoins.

Que ce soit par une hyper-diversification qui risque l’exclusion de certaines populations et la perte de l’ancrage racinaire d’une marque, et un méta-concept rassembleur à tout prix mais sans sens perceptible, un travail de coordination place le marketing en première ligne.

Car différencier et faire commun ne vont pas l’un sans l’autre. Différencier c’est prendre en compte des populations diversifiées, tout en créant une envie d’appartenance et d’adhésion à une marque reconnaissante. Et faire commun est plus qu’un surf opportuniste sur les tendances. C’est mettre en adéquation une « transcendance » – La France, la Santé, l’Environnement, le Végétal etc. – et ses preuves dans le réel pour diverses populations.

Si le consensus n’est pas l’unanimité, on pourrait imaginer des communautés d’individus reliés par des règles communes et pour le bien commun. Et contrairement au (super)pouvoir du politique, le marketing pourrait offrir une image démocratisée et arrimée à la confiance, à la clarté des offres, à la désirabilité d’appartenance. Sous condition que les bénéfices secondaires soient perceptibles et aillent dans le bon sens. Celui choisi par les marques via leur territoire et leurs valeurs pour ne pas exclure mais singulariser de manière juste, équitable, et réparer les liens par un sentiment partagé d’égalité, dans l’acception des différences.

 

Danielle Rapoport Membre du Conseil Scientifique de l’Adetem – Psychosociologue. Auteure, conférencière, consultante.

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